lundi 29 avril 2013

Lire des histoires de goules


Allan Gray arrive dans la petite ville de Courtempierre
et s'installe à l'auberge. La nuit, il reçoit la visite du châtelain
des environs, qui lui remet un paquet à n'ouvrir qu'après sa mort.
Il s'agit d'un grimoire sur les vampires, qui va aider Allan à lutter
contre la malédiction qui semble s'être abattue sur la région.
(Paul Bonnat et son ouvrage ont été créés pour les besoins du film).


En visionnant les premières prises de vue, Dreyer et son directeur
de la photographie, Rudolph Maté, constatèrent que l'image était
curieusement surexposée, une lumière grise s'étant reflétée dans l'
objectif. Au lieu de retourner les premières scènes, ils décidèrent
d'un commun accord de conserver cette étrange luminosité qui
accroissait l'irréalité des images, et fixèrent une fine couche de
gaze sur la caméra pour tourner les séquences suivantes.
Dreyer préférait tourner avec des acteurs non professionnels,
et le premier rôle fut ainsi confié à Julian West, pseudonyme
du baron Nicolas Louis Alexandre de Gunzburg, héritier
d'une famille de la noblesse russe exilée en France, dont ce
devait être l'unique apparition à l'écran. L'homme finança en grande
partie le film de Dreyer, et il fit carrière dans le journalisme de mode
quelques années plus tard après avoir émigré aux Etats-Unis.


dimanche 28 avril 2013

Lire des histoires de vampires


Thomas Hutter, un jeune clerc d'agent immobilier,
se rend en Transylvanie pour vendre une propriété
au Comte Orlok. Dans l'auberge où il fait halte, il
découvre un ouvrage sur les vampires.
Le film est une adaptation transparente du "Dracula"
(1902) de Bram Stoker, même si les noms ont délibérément
été modifiés. C'est que Murnau n'avait pas les moyens
de payer les droits d'adaptation de l'oeuvre originale.
Malgré tout, la veuve de l'écrivain lui intenta un procès
pour plagiat qu'elle remporta en 1925 : toutes les copies
du film furent détruites. Néanmoins, quelques copies illicites
furent conservées dans la clandestinité, qui réapparurent dans
les années soixante pour les premières projections publiques
depuis l'interdiction du film (Florence Stoker était morte en 1937).
Murnau avait changé la fin de l'histoire et choisi de faire mourir
le vampire, détruit par la lumière du jour : c'est ce film qui
a nourri la mythologie selon laquelle les vampires ne supportent
pas la lumière du soleil, alors que dans le roman de Stoker,
Dracula se promène dans Londres en pleine journée...


samedi 27 avril 2013

Lire comme un marin


Le Père Mapple monte en chaire et lit un passage de la Bible.
On ne s'étonnera pas que son sermon porte sur l'épisode de
Jonas et de la baleine. John Huston avait d'abord envisagé de
confier le rôle du Capitaine Achab à Orson Welles,
mais son choix se porta finalement sur Gregory Peck.
Orson Welles souffrait de phobies pendant le tournage,
et John Huston gardait une bouteille de brandy sur le plateau
pour l'aider à combattre ses angoisses.


Lorsque John Huston proposa à Ray Bradbury d'écrire le scénario
du film, il lui demanda ce qu'il pensait de l'oeuvre originale d'Herman
Melville. L'écrivain fut obligé de reconnaître qu'il n'avait jamais réussi
à lire le roman en entier. Huston l'engagea malgré tout, en lui disant d'en
lire ce qu'il pourrait et de revenir le voir. Cette expérience cinématographique
inspira un roman semi-fictionnel à Bradbury, intitulé "La Baleine de Dublin"
(le film fut en effet partiellement tourné en décors naturels en Irlande).


jeudi 25 avril 2013

Lire au coeur des ténèbres


Le Colonel Walter E. Kurtz lit dans la pénombre.
Il lit à voix haute, un poème de T. S. Eliot (Thomas
Stearn Eliot), "The Hollow Men" (1925). Cette
oeuvre a été inspirée au lauréat du prix Nobel de
littérature de 1948 par le court roman de Joseph
Conrad, "Heart of Darkness" (1902) dont le film
de Francis Ford Coppola est une libre adaptation.
Marlon Brando lit le début du poème, mais il a eu
soin d'en passer les premiers vers. Les premiers mots
du poème sont en effet : "Mistah Kurtz - he dead".
Coppola imaginait que Brando connaissait très bien
l'oeuvre originale de Joseph Conrad : lorsque l'acteur
débarqua sur le plateau, il s'avéra qu'il n'en avait
jamais lu une ligne. Le réalisateur passa les semaines
suivantes à lui déclamer le texte à tue-tête toute la
journée. Notons que ce fut d'abord George Lucas
qui fut envisagé pour tourner le film sur un scénario
de John Milius, mais Lucas préféra se consacrer à un
autre projet, "La Guerre des étoiles".

dimanche 21 avril 2013

Lire toujours le même livre


Si on peut reconnaître une qualité au Docteur Constance Petersen,
c'est la persévérance. En effet, "Le Labyrinthe du complexe de
culpabilité" n'est pas une lecture distrayante ou récréative, mais
la jeune femme ne lâche pas l'affaire. Et la prose du Docteur
Edwardes est si efficace qu'on finira par guérir le jeune homme
traumatisé par un souvenir d'enfance particulièrement douloureux.

vendredi 19 avril 2013

Lire un tirage limité


Le Docteur Constance Petersen n'arrive pas à dormir.
Il faut dire qu'elle aimerait vraiment aider à retrouver
la mémoire l'étrange inconnu qui a pris la place du
Docteur Edwardes. Elle se plonge donc dans la lecture
d'un ouvrage dudit Docteur, consacré au
"Labyrinthe du complexe de culpabilité",
tiré à 750 exempaires et dédicacé par l'auteur.



Ce film d'Alfred Hitchcock est aujourd'hui célèbre pour sa fameuse
séquence onirique conçue par Salvador Dali. A l'origine, cette scène
de rêve durait vingt minutes, et fut réalisée par William Cameron
Menzies, que les amateurs de science-fiction connaissent bien.
Malheureusement, le tout puissant producteur David O. Selznick
détestait le travail de Dali, et il imposa que la séquence soit
réduite à deux minutes à peine. Déçu, William Cameron Menzies
refusa que son nom apparaisse au générique, ce dont Hitchcock devait
se féliciter après le succès du film et de la célèbre séquence...


mercredi 17 avril 2013

Lire en marchant



Le Docteur Greenbow lit en marchant dans la campagne.
Rien ne saurait le distraire de sa lecture. Lorsqu'il trébuche
sur le cadavre de Harry, cela ne le déconcentre pas, il se
relève et reprend son livre. A la fin du film, lorsqu'il marchera
pour la deuxième fois sur Harry, il finira tout de même par
comprendre qu'il vient de piétiner un mort, et sera contraint
d'interrompre la lecture du sonnet 116 de William Shakespeare.


Alfred Hitchcock avait insisté pour ce que soit un véritable
acteur (vivant, en l'occurrence) qui joue le rôle du cadavre de
Harry : il choisit Philip Truex. Ce film est également le premier
long-métrage de la toute jeune Shirley MacLaine.


mardi 16 avril 2013

Lire pour transmettre des valeurs


La jeune veuve Delphine Downing est une passionnée
de commémorations, et elle entend bien transmettre à sa
fille Rainelle le fabuleux héritage de l'histoire nationale
américaine. Malheureusement, Martha Beck et Ray Fernandez
ne l'entendent pas de cette oreille. Quand Martha apprend
de la bouche de Delphine qu'elle est enceinte des oeuvres
de Ray, son sang ne fait qu'un tour : elle empoisonne Delphine,
et comme le poison est trop lent à son goût, et Ray trop timoré,
elle lui tire une balle dans la tête. Que faire de la petite orpheline ?
Pas de problèmes, Martha s'en charge : elle tue la fillette dans
la cave, en la noyant dans une flaque d'eau sale.
A l'origine, c'est Martin Scorsese qui devait réaliser le film,
mais il fut évincé au bout d'une semaine de tournage au profit
de Donald Volkman, qui fut bientôt remplacé à son tour par
Leonard Kastle. François Truffaut déclara qu'il s'agissait
de son film américain favori. Etonnant, non ?

lundi 15 avril 2013

Lire pour les démasquer


Rosemary deviendrait-elle folle ? Non, car même les paranoïaques
ont des ennemis. Par delà la mort, son vieil ami Hutch lui révèle 
l'horrible vérité grâce à un livre intitulé "All of them witches"
(Tous des sorciers), et un indice posthume : "le nom est une
anagramme". Rosemary découvrira ainsi que son inoffensif
voisin Roman Castevet est en réalité le terrible sorcier Steven
Marcato.


On notera que la première victime des sorciers est un acteur,
Donald Baumgart, qui cède sa place pour un premier rôle au
mari de Rosemary après avoir soudain été frappé de cécité.
Ce sort funeste est l'occasion d'un étonnant cameo vocal :
c'est la voix de Tony Curtis qu'on entend au téléphone.
Cerise sur le gâteau : Mia Farrow n'était pas prévenue,
et comme la voix lui semble familière sans qu'elle parvienne
à mettre un nom dessus, elle paraît particulièrement troublée
dans cette scène, ce qui était précisément le but de ce stratagème.


dimanche 14 avril 2013

Lire dans son canapé


On ne devrait jamais adresser la parole à ses voisins.
La jeune mariée Rosemary Woodhouse voudrait bien
lire tranquille, mollement étendue sur son canapé.
Mais son horrible voisine, la vieille Minnie Castevet,
va encore sonner à la porte et venir l'emmerder...
Rosemary lit les mémoires de Sammy Davis Jr,
prophétiquement intitulées "Yes I can", publiées en 1965.
Maintenant, soyez attentifs, s'il vous plaît :
ce film a été réalisé par Roman Polanski, alors marié
à Sharon Tate, qui sera assassinée un an plus tard par
Charles Manson, fasciné par la chanson "Helter Skelter"
des Beatles, dont le leader, John Lennon, lui aussi
assassiné en 1980, habitera quelques années plus tard
dans un appartement de l'immeuble Dakota dans
l'Upper West Side, où le film a précisément été tourné.
Vous me suivez ?


samedi 13 avril 2013

Lire pour se faire des amis


Le jeune Alfred éprouve un doux sentiment pour la belle Sarah,
la fille du patron de l'auberge où il s'est installé avec le professeur
Abronsius pour partir à la chasse aux vampires. Il dispose d'un
précieux ouvrage pour déclarer sa flamme à l'élue de son coeur.
Hélas, Sarah est enlevée par le diabolique Comte Von Krolock,
et le petit livre atterrit dans les mains du fils de ce dernier, Herbert,
un vampire à la blonde crinière et aux manières distinguées
qui semble avoir un penchant pour les garçons, et pour
Alfred en particulier.
C'est le producteur du film qui a insisté pour que Sharon Tate
obtienne un rôle alors que Roman Polanski lui aurait préféré
l'actrice Jill St. John. Roman épousera la belle Sharon un an
plus tard, et le 9 août 1969, elle sera assassinée par Charles Manson
et sa "famille" alors qu'elle était enceinte des oeuvres de son mari.


vendredi 12 avril 2013

Lire avec sa grande soeur


Alice s'ennuie, assise dans l'herbe à ne rien faire.
Elle voudrait bien jeter un oeil au livre de sa grande
soeur, mais celle-ci l'en empêche. Alors Alice part à
l'aventure, dans un monde étrange, à la fois effrayant
et merveilleux.
Ce film, premier long-métrage du réalisateur tchèque
Jan Svankmajer, mêle images filmiques et animation.
Il a remporté le titre de "Meilleur film d'animation" au
festival d'Annecy en 1989.


jeudi 11 avril 2013

Lire pour rêver


Alice s'ennuie. Sa lecture ne la captive pas.


Sa petite chatte Dinah sur les genoux, elle abandonne
bientôt le pesant volume pour des rêves plus vivants.
Pour ce film, plus de 7000 candidates furent auditionnées
pour le rôle d'Alice, avant que la jeune Charlotte Henry
ne soit retenue.


dimanche 7 avril 2013

Lire à l'hôpital


Lorsque l'on travaille à l'accueil, à l'hôpital, il y a parfois des temps morts.
Cette infirmière a trouvé un moyen de s'occuper : elle lit un ouvrage de Jack
Dawn intitulé "My filthy dreams" (que l'on pourrait traduire par "Mes rêves
dégoûtants"). Elle est si absorbée par sa lecture qu'elle ne remarque pas que
plusieurs patients ont besoin d'aide, et reste sourde à leurs appels au secours.
Le livre qu'elle a entre les mains est un livre imaginaire ; cependant, le nom
de Jack Dawn renvoie peut-être à un célèbre maquilleur américain qui oeuvra
notamment sur "Le Magicien d'Oz" et la version de 1941 de "Docteur Jekyll
et Mister Hyde". Serait-ce un pur hasard ?
Notons que le film de Mel Brooks, qui ne contient qu'une seule et unique
réplique (le "Non !" retentissant du Mime Marceau à qui on propose de
participer au film) figure dans le Guinness Book des records comme le film
comportant le moins de paroles de l'histoire du cinéma parlant.


samedi 6 avril 2013

Lire comme des moutons


John Nada n'a pas d'avenir, mais il n'en a rien à foutre.
Jusqu'au jour où il tombe sur de prodigieuses lunettes qui lui
ôtent ses oeillères et lui font voir les choses derrière les choses.
En fait, la réalité est encore pire que ce qu'il croyait.


Nous sommes tous exploités par des extraterrestres qui
nous traitent comme du bétail et nous endorment grâce à
une propagande subliminale omniprésente. Même les livres
n'échappent pas à cette règle, qui nous martèlent en secret
leurs slogans nous incitant à la consommation et à la soumission.
Va-t-on rester sans rien faire, comme des moutons qu'on mène
à l'abattoir ? John Nada est l'homme qui a dit non.


vendredi 5 avril 2013

Lire en cours particulier


Après son accident et sa longue léthargie, Johnny Smith
n'est plus en état de faire cours à une trentaine d'enfants
cruels et malfaisants. Mais comme il faut bien vivre, il se rabat
sur les cours particuliers de littérature. Ce n'est pas la petite
blonde qui ânonne laborieusement qui le poussera à bout.
Et puis c'est l'occasion pour Johnny de ressasser ses obsessions :
ainsi, ce n'est pas un hasard s'il fait lire à la petite fille le conte de
la belle au bois dormant. La version de 1697 de Charles Perrault ?
Ou celle des frères Grimm (Dörnroschen) de 1812 ? Mystère.
Toujours est-il que ce coma de quatre années a durablement marqué
le jeune homme. On remarquera notamment qu'après l'accident et
ses suites, il a opté pour une coiffure totalement différente :
ça vous change un homme...


jeudi 4 avril 2013

Lire en classe


Johnny Smith est un petit professeur de collège de la Nouvelle-Angleterre.
Il mène une petite vie sans intérêt, est fiancé à une collègue sans attrait.
Même son nom est d'une affligeante banalité. Voilà un personnage auquel
on ne consacrerait pas un roman, et encore moins un film, s'il n'était sur le
point de faire la rencontre brutale d'un trente-cinq tonnes au volant de sa voiture.
Son existence en sera bouleversée, qui le verra doté d'un pouvoir de seconde vue
au sortir d'un coma de quatre ans. Ici, il lit un célèbre poème d'Edgar Allan Poe
à ses élèves, "Le Corbeau" :


"Et le corbeau, immuable, est toujours installé,
toujours installé sur le buste pâle de Pallas,
juste au-dessus de la porte de ma chambre ;
et ses yeux ont toute la semblance des yeux
d’un démon qui rêve ; et la lumière de la lampe,
en ruisselant sur lui, projette son ombre sur le plancher ;
et mon âme, hors du cercle de cette ombre
qui gît flottante sur le plancher, ne pourra plus s’élever,
— jamais plus !"

mercredi 3 avril 2013

Lire en troisième classe


Ce que c'est que de voyager au milieu des miséreux.
Le Docteur Villega partage son compartiment avec
Juan Miranda et ses nombreux enfants. Soudain, un
policier fait irruption, que le voleur de grand chemin
poignarde de sang froid. Le bon docteur ne réagit pas,
et garde le nez plongé dans son livre. Mais Juan sera
plus surpris encore lorsque l'intellectuel l'aidera à se
débarrasser d'un deuxième policier.
Notons qu'à l'origine, le rôle du bandit Juan Miranda,
incarné par Rod Steiger, avait été écrit pour Eli Wallach.



mardi 2 avril 2013

Lire en char d'assaut


Mmmmh, il n'a pas une tête à aimer Bakounine, celui-là...
Une ordonnance apporte au Colonel Gunther "Gutiere" Reza
le livre qu'elle vient de ramasser dans la boue.
L'officier ne descend même pas de son char, il se contente
d'examiner l'ouvrage, en lit quelques lignes : cela lui suffit.
Non, il n'aime pas Bakounine.
On notera d'ailleurs que Gunther n'a pas vraiment une tête
de Mexicain. Pourtant, en 1913, les Allemands n'avaient pas
encore émigré en masse en Amérique du Sud. Qui s'en étonnera ?


lundi 1 avril 2013

Lire dans la boue



Mexique, 1913. Un patriote irlandais en rupture de ban,
ancien membre de l'IRA en fuite, lit un ouvrage de Bakounine.
Son compère Juan Miranda, pilleur de banques et de diligences,
se lance alors dans une violente tirade sur la révolution : pour lui,
les révolutions ne sont que manipulation et instrumentalisation des
pauvres et des miséreux par les intellectuels qui en tirent seuls profit.
Apparemment ébranlé, John Mallory jette son livre dans la boue.
Petit problème : Bakounine, même s'il a rédigé quelques articles sur
ce thème en 1869, n'a jamais publié de livre qui porte ce titre.
Par ailleurs, on se demande bien ce qu'un membre de l'IRA ferait
d'un livre qui dénonce le patriotisme. Il semblerait simplement que
Sergio Leone, avec ses gros éperons, ait voulu dénoncer les inégalités
et le statu quo dont s'accommodent toujours les meneurs révolutionnaires
au détriment des masses qu'ils utilisent à leurs propres fins. Reste que
l'image de cette bible (fictive) de l'anarchisme jetée aux orties en aura
marqué plus d'un...